Présentation du contrat de collaboration ou de remplacement dans le secteur médical
Cet article a pour objet de traiter la problématique fiscale au regard de la TVA dans le cadre d’une collaboration, dans le domaine médical. Pour cela nous allons d’abord vous faire une présentation des principales caractéristiques propres à chaque contrat.
Il est de coutume dans le secteur de la santé (médecins, dentistes, etc…) de faire appel à un confrère pour un remplacement ou un collaborateur, à court ou moyen terme. Néanmoins, cette collaboration peut avoir des conséquences fiscales notamment au regard de la TVA. De plus, l’utilisation de ces dispositifs de remplacement ou de collaboration sont soumis à plusieurs conditions
A- Le contrat de remplacement dans le secteur médical
1- Quelles sont les règles applicables en cas de remplacement dans le milieu médical ?
Un médecin, un dentiste, ou tout autre professionnel médical peut en cas d’indisponibilité (vacance, maladie, etc…), faire appel à un confère pour le remplacer. Ce remplacement temporaire, doit être ponctuel mais peut être renouvelé. Le remplaçant doit obligatoirement avoir l’un des statuts suivants :
- Etre un professionnel médical inscrit à l’ordre de sa profession
- Etre un étudiant titulaire d’une licence de remplacement sous réserve d’avoir obtenu l’accord du conseil départemental de l’ordre de sa profession. Il doit également répondre aux contraintes propres à chaque code ou règles de la profession. Un étudiant en médecine peut occuper un poste de remplaçant pour une durée maximale de 3 mois renouvelable. Cette limite n’est plus d’actualités pour les dentistes, mais un remplacement trop prolongé n’est pas recommandé.
A noter également qu’il est possible de réaliser un remplacement partiel (quelques jours par semaines). Dans ce cas, l’autorisation doit émanée de du conseil national de la profession médicale.
2- Quelles sont les démarches à effectuer pour la mise en place d’un remplacement ?
Le médecin titulaire qui souhaite mettre en place un remplacement temporaire doit prendre contact au préalable avec son conseil départemental. Le titulaire devra transmettre les informations suivantes :
- Identité complète du remplaçant
- Durée et contrat de remplacement
- Justificatifs concernant le remplaçant (inscription à l’ordre ou copie de licence étudiante)
Le conseil départemental donne ensuite son avis ou son autorisation pour le remplacement.
Une fois le remplacement acté, c’est le remplaçant qui est tenu pour responsable en cas de faute professionnelle. Il a d’ailleurs l’obligation de souscrire à une assurance RCP.
3- Comment fonctionne le remplacement en pratique
Le praticien remplaçant utilise les feuilles de soins du dentiste ou médecin titulaire. Il doit barrer le nom de ce dernier et rajouter ses propres informations tout en précisant son statut de remplaçant. Il peut également obtenir une carte professionnelle pour la gestion automatique des feuilles de soins électroniques.
Les honoraires sont encaissés et comptabilisés pour le compte du praticien titulaire, qui doit ensuite effectuer une rétrocession. Cette dernière est librement fixée entre les parties et mentionnée dans le contrat de remplacement.
4- Quel statut juridique et fiscal du dentiste ou médecin remplaçant.
Un dentiste ou médecin déjà inscrit à l’ordre professionnelle qui opère un remplacement exerce en utilisant son statut juridique actuel. D’un point de vue fiscal, la rétrocession perçue est intégrée à ses recettes imposables.
Pour un étudiant ou un nouveau praticien, il est nécessaire de réaliser une formalité juridique auprès des URSSAF des indépendants afin de s’inscrire comme professionnel et obtenir un SIREN. Il aura ensuite le choix entre le régime fiscal micro ou le régime réel (2035 BNC régime de la déclaration contrôlée). Le régime micro apporte l’avantage d’une obligation réduite d’un point de vue comptable. La base imposable est calculée sur son chiffre d’affaires après un abattement de 34%. Les cotisations sociales sont calculées forfaitairement (environ 22% du chiffre d’affaires encaissé).
A l’inverse, en choisissant le régime réel (BNC 2035 régime de la déclaration contrôlée), il faut tenir une comptabilité en bonne et due forme. Le bénéfice imposable correspond à la différence entre les recettes encaissées et l’ensemble des dépenses déductibles.
B- Le contrat de collaboration pour les médecins et dentistes
1- Comment fonctionne le contrat de collaboration ?
Les « nouveaux médecins » peuvent rencontrer des difficultés liées à l’installation ou la création d’une patientèle. Le contrat de collaboration est une alternative permettant d’accéder facilement à la profession de médecin ou de dentiste sans avoir à se préoccuper du local, du matériel, etc… En mettant en place ce contrat, le collaborateur travaille conjointement avec le dentiste ou médecin titulaire qui est généralement propriétaire du fonds de commerce.
Contrairement à un contrat de remplacement, le collaborateur doit obligatoirement être inscrit à l’ordre professionnel. Il ne peut donc pas avoir le statut d’étudiant. De ce fait, il est en « ligne directe » avec le patient. Le collaborateur émet des actes et encaisse pour son propre compte. Il est seul responsable de tous les actes prodigués sur ses patients.
Le collaborateur libéral bénéficie de nombreux avantages qui sont :
- Mise à disposition d’un local, de matériel, et d’un encadrement administratif selon cas.
- Aucun engagements juridiques ou financiers autre que ceux prévus dans le contrat de collaboration.
- Entrée dans la profession tout en étant épaulé par un professionnel expérimenté.
- Possibilité de création d’une patientèle.
Le contrat de collaboration qui comporte un certain nombre de règles et de conditions de fonctionnement doit être communiqué à l’ordre territorial. Il peut être établi pour une durée déterminée ou indéterminée. Afin de minimiser les risques conflictuels, nous vous recommandons de faire appel à un professionnel du droit pour la rédaction et la fixation de l’ensemble des règles.
Modèle de contrats pour médecins
Modèle de contrats pour dentiste
2- Quel est le statut juridique, fiscal et social du collaborateur ?
Le collaborateur est avant un professionnel de santé. Il exerce une activité libérale et des obligations comptables, fiscales et sociales. Celui ci doit s’inscrire à l’ordre des médecins ou des dentistes. Il doit souscrire à une assurance RCP et déclarer son début d’activité auprès des URSSAF, et autres organismes sociaux. Il devra ensuite choisir son régime fiscal sachant qu’il relève du régime BNC. Il pourra opter tantôt pour le régime micro (s’il ne dépasse pas les seuils), ou choisir le régime réel. Nous vous conseillons pour cela, de vous rapprocher de votre expert-comptable à Paris pour un choix judicieux. Enfin, le collaborateur devra adhérer à une association de gestion agréé, et se faire accompagner par un cabinet d’expertise comptable pour l’ensemble des obligations comptables et déclarations fiscales.
Le médecin ou dentiste collaborateur pourra également avoir un statut de salarié. Dans ce cas, une relation employé-employeur est mise en place. Le médecin « titulaire » devra établir un CDD ou CDI de collaboration et effectuer une DPAE. Le collaborateur est rémunéré par le biais de bulletins de salaires selon les conditions financières définies dans le contrat de travail. En choisissant ce statut, le médecin collaborateur n’a aucune contrainte administrative à l’exception de son inscription à l’ordre et de la souscription d’une assurance RCP.
C- Qu’en est il de la TVA dans le cadre d’un contrat de remplacement ou de collaboration ?
L’ensemble du secteur médical est par principe exonéré de TVA. Cette exonération s’étend aux professions paramédicales et dans certains cas, à la vente de fourniture et matériel médical. Il existe néanmoins certaines exceptions.
1- TVA et contrat de remplacement
De manière générale les contrats de remplacement dit « occasionnels » n’entrent pas dans le champ d’application de la TVA. Le médecin ou dentiste remplacé qu’on appellera « le titulaire », encaisse l’ensemble des honoraires et reverse au remplaçant un montant définit dans le contrat. L’exonération de TVA n’est pas remise en question sur les sommes encaissées par le titulaire pour les soins réalisés par le dentiste ou médecin remplaçant.
Dans ce contexte, la différence entre les recettes encaissées et la rétrocession versée au remplaçant, n’est pas non plus soumise à TVA pour le titulaire. Cette somme, que l’on nommera la redevance, permet au titulaire de couvrir les frais de structures, de consommation, etc…. Elle n’est pas considérée comme un revenu accessoire de part le caractère occasionnel du contrat.
Cependant, si le remplacement n’est plus qualifié d’occasionnel, le contrat rentre dans le champ d’application de la TVA. Pour faire simple, si le contrat de remplacement s’apparente plus à une collaboration (contrat longue durée ou reprise d’activité du titulaire), le caractère occasionnel est remis en question.
La base soumise à TVA, correspond à la marge bénéficiaire du titulaire (100% des soins encaissés – rétrocession versées au remplaçant). Nous rappelons que le titulaire qui ne travaille pas, perçoit (ou garde pour lui) une redevance liée à la mise à disposition de matériel, d’une clientèle, d’un local, etc…
Ces redevances qui ne correspondent pas à un revenu d’activité médicale, sont donc soumises à TVA. Pour faciliter la compréhension du concept, il faut considérer que le titulaire a une activité secondaire de location de matériel, de local professionnel, de fonds de commerce, etc… Nous rappelons que toute activité de location ou de mise à disposition de moyens, est soumise à TVA. Néanmoins, si le seuil du régime de franchise de TVA n’est pas dépassé, la redevance reste non soumise à TVA.
Dans tous les cas de figure, seul le titulaire est impacté par la TVA. Le dentiste ou médecin remplaçant n’a pas à se soucier de cette problématique. Le contrat peut cependant mettre en avant de manière explicite, le calcul de la redevance, en prenant des bases hors taxes ou TTC.
Pour calculer la TVA collectée (due) par le titulaire, il faut prendre le montant de la redevance perçue (à considérer en TTC), en la ramenant en hors taxe (redevance encaissée/1,20) puis calculer la TVA à 20% sur la base HT de la redevance.
Du côté du remplaçant, les sommes perçues correspondent à une rémunération pour les soins réalisés de manière générale. C’est ce que l’on appelle les honoraires rétrocédés. Aucune TVA n’est applicable.
2- TVA et contrat de collaboration
Dans le cadre d’un contrat de collaboration, le praticien titulaire, détient un local, du matériel, une clientèle, etc… Il met à la disposition d’un collaborateur l’ensemble de ces éléments moyennant une redevance.
Contrairement au remplaçant, c’est le collaborateur qui génère en son nom propre les feuilles de soins et encaisse les honoraires liées aux soins qu’il pratique. Il reverse ensuite une redevance au titulaire. La redevance revêt alors du même caractère « commercial » ou d’activité secondaire pour le titulaire (voir contrat de remplacement). La redevance est donc soumise en TVA
D’un point de vue comptable, la redevance versée par le collaborateur au titulaire doit être comptabilisée en compte 604000 et apparaitre en ligne 16 de la 2035 A. De plus, la TVA collectée par le titulaire, n’est pas déductible pour le collaborateur qui n’est pas assujetti à TVA.
Pour le titulaire, la redevance perçue (qui n’est pas un acte médical mais un revenu accessoire), est soumise à TVA si les seuils de franchise de base en TVA sont dépassés. Cette redevance perçue est comptabilisée en gains divers compte 758000.
3- Quelle solution pour les collaborateurs des professionnels de santé installés en nom propre
S’il est possible théoriquement de distinguer juridiquement et fiscalement, les redevances de mise à disposition d’outils de travail d’une part, d’une redevance liée à l’accompagnement, l’encadrement et le conseil médical d’autre part, cette dernière redevance pourrait ne pas être soumise à TVA. Cette piste reste à creuser et nécessite une consultation auprès des services fiscaux ou d’avocats fiscalistes. Il serait également possible théoriquement, de pouvoir déduire une partie de la TVA sur les frais de location de matériel, du local, ou même des fournitures, payées par le titulaire.
4- Quelle solution alternative à la problématique de la TVA en cas de collaboration
Si jusqu’à présent, nous avons évoqué différents cas et les solutions propres aux professionnels de santé exerçant leur activité en nom propre, notre cabinet d’expertise comptable vous propose une solution qui présente d’autres avantages. L’idée consiste à immatriculer une SELARL, société d’exercice libérale à responsabilité limitée, dans laquelle le médecin ou dentiste titulaire est l’associé majoritaire et le représentant légal. Le collaborateur quant à lui, perd son statut de collaborateur pour devenir associé et co-gérant. Ainsi, les sommes perçues par ce dernier sont assimilés à une rémunération de gérance et non à une rétrocession ou redevance. Il est affilié au régime social des indépendants et déclare ses revenus dans la catégorie traitement et salaires, et la déclaration sociale des indépendants pour le calcul des charges sociales (eviron 45% de la rémunération prise). Le collaborateur n’a plus besoin d’avoir un statut fiscal. Il n’a pas besoin de s’inscrire à l’URSSAF en qualité de BNC mais uniquement à l’URSSAF des indépendants pour les charges sociales. Il n’a plus d’obligations comptables ou fiscales.